Résolution bidon pour la pire des options  

20/07/2012  Conformément à leur politique, Russie et Chine ont à nouveau opposé jeudi un double véto à une énième résolution atlantiste destinée à ouvrir la voie à des frappes sur la Syrie. Conformément à leur volonté hystérique d’en découdre, les Occidentaux ont écumé de rage, ou plutôt ont fait semblant. Car soyons clairs, il s’agissait d’une résolution bidon dans le cadre d’une pièce de théâtre onusienne tout aussi bidon, et simplement montée pour ouvrir la voie à un appui massif aux insurgés, voire à de vertueuses frappes humanitaires.
Personne en effet n’a cru un instant que la Russie et la Chine allaient soudainement changer leur fusil d’épaule. L’opération était donc une simple opération de communication devant permettre aux Atlantistes de jouer les vierges outragées pour accuser, une fois de plus, Moscou et Pékin de soutenir les démons de l’enfer contre les anges de la liberté. Des anges qu’il allait dès lors falloir, et c’était là l’objectif de toute cette mascarade, soutenir hors la légalité internationale.  Et comme prévu, Washington et Londres ont donc promis d'agir désormais «en dehors» du cadre des Nations unies dans ce dossier.

Coup de pouce «à la libyenne»
C’est que le temps presse. L’offensive des mercenaires de l’ASL contre la capitale a créé l’illusion d’une victoire imminente de la rébellion qu’il convient de capitaliser. Quant à l’étrange attentat perpétré mercredi dans l’un des sanctuaires du régime, il a été présenté comme une démonstration de force des rebelles contre un appareil d’Etat agonisant. Pour l’heure, on ne sait toujours pas s’il s’agit d’un inside job ou d’une opération organisée par la la CIA ou le Mossad. Toujours est-il que le Bloc atlantiste pense être à bout touchant, convaincu de déceler dans l’odeur du chaos et du sang damascènes celui de la victoire finale. Ne manquerait donc aujourd’hui qu’un petit coup de pouce «à la libyenne» pour faire basculer la chose définitivement.
De son côté, la majorité de la population syrienne est
«terrorisée» à l’idée d’un possible triomphe des «rebelles», qui signifierait sans aucun doute un bain de sang généralisé à l’encontre des minorités chrétienne et alaouite notamment. Mais qui s’en soucie ?
Drapé dans leur vertu, dressés sur leurs ergots d’humanistes à l’indignation aussi outrancière que sélective, les Occidentaux devraient donc, pour le plus probable, augmenter massivement leurs livraisons d’armes à tout ce qui se prétend rebelle; augmenter massivement l’envoi de jihadistes puisés dans les rangs désormais amis des barbus de Libye ou d’ailleurs ; augmenter massivement le nombre des troupes d’élites occidentales, pardon, des conseillers qui encadrent certains gangs au sol ; et peut-être même se laisser aller à quelques bombardements humanitaires à l’aide de drones pilotés depuis le Nevada par des «geek» adipeux rompus aux massacres de civils entre la poire et le fromage.
L’option haute étant bien sûr la constitution d’une petite coalition colorée de pays contraints de placer, à leur cœur défendant bien sûr, la morale au-dessus d’une légalité prise en otage par des méchants vraiment trop méchants. Mais la Syrie n’étant ni la Libye ni le Kosovo, une telle coalition devrait se cantonner à des frappes aériennes pour clouer, par exemple, l’aviation syrienne au sol et l’empêcher d’anéantir les colonnes de mercenaires qui entrent actuellement dans le pays par la Turquie, l’Irak ou la Jordanie.

Les troufions embedded fidèles au poste
Bien sûr, tout cela sera balisé, encadré, soutenu et vendu (c’est le mot qui convient le mieux) par la prose humide et exaltée des troufions embedded de la sous-culture journalistique. Totalement soumis au terrorisme intellectuel qui prévaut sur ce dossier, ou simplement conquis par le romantisme délirant d’une révolution de papier mâché, ils défendront avec fougue la manœuvre, expliquant que, vraiment, la liberté est à ce prix ; qu’il faut savoir parfois faire des concessions avec ses propres valeurs (tiens, j’ai déjà entendu ça quelque part…), le tout réhaussé bien sûr par le fracas et l’héroïsme d’images détournées, non datées, non vérifiables mais si sexy, et par les bilans bidons et les récits bidons de l’officine bidon de l’OSDH.
A l’heure où nous écrivons ces lignes, on annonce donc que Bachar a finalement accepté de partir, puis que ce n’est pas vrai, ou peut-être si quand même; que Damas est sur le point de tomber ; que les rebelles contrôlent les frontières du pays (où ils se distinguent surtout par leur barbarie, selon des sources dissidentes) etc… etc… etc… Bref, la machine de communication du Système tourne à plein régime sans que personne ne puisse avoir la moindre idée de la réalité des évènements sur le terrain.
Des mégatonnes d’infos pour ne rien savoir.
Le Système à l’exercice dans toute sa splendeur en somme.
Une source à Beyrouth nous confie toutefois que puisque la voie d’un règlement politique est désormais complètement bouchée du fait de l’attitude jusqu’au-boutiste des Occidentaux, «il est très probable désormais que le régime syrien utilise les grands moyens pour écraser les bandes de l’ASL et en finir une fois pour toute avec l’insurrection armée».
A suivre donc.

La guerre-Système sur pilote automatique
Irak, Afghanistan, Somalie, Soudan, Libye et maintenant Syrie : le Bloc atlantiste ne fait finalement que poursuivre le vieux plan de remodelage du Grand-Moyen-Orient lancé par les néocons sous la dynastie Bush, sauf qu’il l’applique désormais à la faveur d’un «Printemps arabe» totalement instrumentalisé.
Et même s’il ne reste que ruines, chaos et guerre civile partout où il passe, il fonce tête baissée, les yeux rivés sur ses sublimes et vertueux desseins, nourrissant l’étrange et folle certitude qu’à la fin toutes ces dévastations feront soudain sens, qu’à la fin leur plan accouchera d’une divine victoire avec la création d’un merveilleux Grand-Moyen-Orient apaisé et reconnaissant, c'est-à-dire soumis.
Et pour parachever ce grand-œuvre, il faut briser le dernier axe de résistance à la domination occidentale au Moyen-Orient que représente le non alignement de l’Iran, de la Syrie, et partiellement du Liban et de la Palestine.
Sauf que la Russie et la Chine ont fait savoir on ne peut plus clairement qu’ils avaient tracé une ligne rouge à la voracité occidentale, ligne rouge passant par Damas et Téhéran justement. Et sauf à finir par déclencher une guerre régionale de grande ampleur pour tenter de casser cette ligne, on voit mal où l’hystérie guerrière occidentale pourrait bien nous mener désormais.
Pour l’heure, le vertueux plan atlantiste de remodelage du Grand-Moyen-Orient se résume donc aux ruines, aux dévastations et au chaos, avec la promesse de davantage de ruines, de dévastations et de chaos encore.
La guerre-Système sur pilote automatique en somme.

PS : et pendant ce temps-là, la tête de pont atlantiste au Moyen-Orient, l’entité sioniste donc, fait monter la pression autour de l’Iran suite à l’attentat en Bulgarie. Là encore, on se demande jusqu’où cela pourrait nous mener même si, aux USA, de grosses pointures estiment déjà, comme nous d’ailleurs, qu’une guerre US contre l’Iran entraînerait sa ruine.