Hariri aurait peut-être été assassiné afin de dégager le terrain pour une énorme base aérienne américaine au Liban

par Wayne Madsen*

in Online Journal, 12-3-2005

Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier

Selon des sources informées des services d’espionnage libanais (chrétiens et musulmans), le Premier ministre libanais Rafiq Hariri aurait été assassiné au moyen d’une bombe commandée à distance (mais par fil) sophistiquée avec le feu vert de l’administration Bush et du gouvernement israélien (Ariel Sharon - Likoud).

Il existe de fortes présomptions que l’assassinat de Hariri ait été perpétré par les mêmes agents incontrôlés des services syriens, qui furent l’instrument de l’élimination du dirigeant chrétien libanais Elie Hobeika, tué par l’explosion de sa voiture personnelle alors qu’il s’apprêtait à témoigner contre Sharon devant un tribunal de Bruxelles examinant des charges pour violation des droits de l’homme (par Israël). Ce procès portait sur le rôle joué par le Premier ministre israélien dans les massacres perpétrés par l’armée israélienne, en 1982, dans les camps de réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila, à Beyrouth. L’assassinat de Hariri a nécessité le recours à la technologie de la bombe «électrique» du fait que ses gardes du corps recouraient à des contre-mesures pour parer aux bombes télécommandées (sans fil). On apprend par ailleurs que l’administration Bush a eu recours à des agents des services secrets syriens afin de torturer des personnes soupçonnées d’appartenir à Al-Qa’ida, dans le cadre d’un programme de coopération dénommé «plus vrai que nature».

Hariri, nationaliste tant panarabe que libanais, était connu pour son opposition inébranlable à l’installation d’une importante base aérienne américaine dans le nord du Liban. Les États-Unis veulent que les troupes syriennes quittent totalement le Liban, avant d’entamer la construction de cette base. Des rencontres de Hariri avec le Hezbollah, peu avant sa mort, avaient eu aussi le don de rendre folles de rage Washington et Jérusalem, indiquent des sources libanaises du renseignement.

Les experts ès désinformation de Washington et de Jérusalem ont essayé de faire passer l’assassinat de Hariri pour l’œuvre des services syriens, sur ordre du Président Bashar al-Assad. Toutefois, plusieurs spécialistes du Moyen-Orient, à Washington, ont relevé que l’assassinat de Hariri n’était absolument pas dans l’intérêt d’Assad, et qu’en revanche les administrations Bush et Sharon avaient tout à y gagner, notamment une insurrection populaire libanaise contre l’occupation syrienne.

Des sources libanaises indiquent qu’avant même qu’un accord définitif ait été signé avec le Liban, le contrat concernant cette base aérienne américaine au Nord du Liban a été remis par le Pentagone à la société Jacobs Engineering Group, sise à Pasadena, en Californie, certains travaux de sous-traitance devant être confiés au groupe Bechtel.

Les entreprises Jacobs Engineering et Jacobs Sverdrup sont actuellement sous contrat en Arabie Saoudite (pour Aramco), en Irak (pour l’autorité d’occupation), en Bosnie, en Turquie, en Syrie, au Liban, en Israël, en Jordanie, au Yémen, au Sultanat d’Oman et aux Emirats Arabes Unis.

La base aérienne américaine (au Liban) devrait servir de plate-forme logistique et de transit pour les forces américaines en Irak, ainsi que de centre de loisirs pour les soldats américains engagés dans la région. De plus, la base «libanaise» devrait servir à protéger les pipelines américains dans la région (Bakou-Tbilissi-Ceyhan et Mossoul-Kirkouk-Ceyhan), ainsi qu’à déstabiliser le gouvernement Assad en Syrie. Des indices permettent d’avancer que cette base en gestation serait aussi importante que celle, américaine elle aussi (bien sûr) d’Al-Udeid, au Qatar.

Plusieurs sources de services de renseignement se recoupent, indiquant que les assassinats de dirigeants étrangers tels Hariri et Hobeika relèvent du feu vert de deux hauts responsables de la Maison Blanche: l’adjoint au chef d’état-major Karl Rove et le vice conseiller ès sécurité nationale Elliot Abrams. Ajoutons qu’Abrams est l’agent de liaison clé entre la Maison Blanche et le cabinet de Sharon pour ce genre de coups tordus, allant jusqu’à l’assassinat politique.

«Abrams, c’est le mec que les Israéliens viennent voir pour qu’il leur fasse un clin d’œil et un petit hochement de tête d’acquiescement avant de lancer ces coups-là», a indiqué une source bien informée.

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*Wayne Madsen, journaliste et éditorialiste vivant à Washington, est l’auteur du livre: «Le cauchemar de l’Amérique: La présidence de George Bush II» («America’s Nightmare: The presidency of George Bush II»).